Sortie prématurément de l’Euro, l’Equipe de France doit rapidement se tourner vers 2022 avec un titre de champion du monde à défendre. Sélectionneur, joueurs, identité de jeu, panorama des chantiers des Bleus.
En raison du report de l’Euro en 2021, un an seulement nous sépare de la prochaine Coupe du Monde organisée au Qatar. Avec ce timing serré et des éliminatoires qui ont déjà démarré, il n’y a pas de temps à perdre pour les Bleus pour faire le bilan de cet championnat d’Europe raté et se projeter sur 2022.
Avec quel sélectionneur ?
Didier Deschamps vient de connaître son premier échec depuis son arrivée à la tête des Bleus en 2012. Quart de finaliste au Mondial 2014, finaliste de l’Euro 2016, Champion du Monde en 2018, le Basque avait toujours su répondre présent dans les grandes compétitions. Mais pour la première fois DD n’a pas atteint l’objectif formulé par le président de la FFF Noël Le Graët : être dans le dernier carré.
Suffisant pour entraîner le renvoi de l’ancien entraîneur de l’OM ? Probablement que non.
Les deux hommes ont prévu de se rencontrer très prochainement, mais il y a de fortes chances que Deschamps soit maintenu dans ses fonctions, même si les candidatures de Zinedine Zidane, désormais libre de tout contrat suite à son départ du Real Madrid, ou d’Arsène Wenger ne peuvent être totalement écartées.
Certes l’échec dans cet Euro est de taille mais il demeure moins traumatisant que le fiasco de 2002 ou que la déroute de Knysna en 2010. Bien entendu la France aurait dû se qualifier face à un adversaire qui lui était inférieur, mais on est loin du néant des derniers mois de l’ère Domenech. On peut par conséquent considérer que Didier Deschamps vient de jouer son collier d’immunité et qu’à présent il n’aura plus le droit à l’erreur.
Avec quels joueurs ?
Certes 2022 est tout proche, mais les carences individuelles et collectives ont été trop nombreuses pour être passées sous silence, notamment dans le secteur défensif.
Une défense à renforcer
L’Equipe de France a avant tout besoin de retrouver une solidité étiolée en défense avec les petites performances de Pavard, Varane, Kimpembe et Lenglet. Le côté droit est particulièrement préoccupant car les solutions de recours à Benjamin Pavard ne sont pas légions. Jules Koundé (22 ans, 2 sélections), habituel défenseur central au FC Séville, n’a pas réussi sa première sélection en Bleu face au Portugal, mais pourquoi ne pas lui imaginer un destin à la Thuram qui avait progressivement glissé sur le côté suite à un accord entre l’entraîneur national (Jacquet) et son coach en club (Tigana) ? C’est assurément aujourd’hui la meilleure piste à explorer pour le sélectionneur. La polyvalence de Ferland Mendy (26 ans, 7 sélections), capable d’occuper les deux couloirs de la défense, est également à prendre en considération même si le côté gauche reste le poste de prédilection du Madrilène.
Dans l’axe central, outre le rétablissement souhaité d’un Umtiti guère épargné par les blessures depuis trois ans, 3 noms se dégagent dans le vivier des Espoirs pour renforcer un secteur en souffrance : Dayot Upamecano (22 ans, 3 sélections) dont les premiers pas sous le maillot du Bayern seront scrutés, Wesley Fofana (20 ans) qui a réussi ses débuts en Premier League à Leicester et Boubacar Kamara (21 ans) seul Marseillais à avoir tiré son épingle du jeu la saison passée.
Un milieu de terrain à densifier
Si les duettistes Kanté et Pogba, secondés par Rabiot, font l’unanimité, c’est l’absence de densité qui a posé problème au moment de faire souffler les tauliers de l’entrejeu tricolore. Le sélectionneur n’a pu compter que sur un Corentin Tolisso, rapidement apparu à cours de rythme après sa longue blessure à la cuisse, et Moussa Sissoko dont les meilleures heures sous le maillot Bleu commencent à dater. Les solutions pour DD se trouvent dans l’antichambre des A avec les révélations des deux dernières saisons de Ligue 1 le Rennais Eduardo Camavinga (18 ans, 3 sélections) et le Monégasque Aurélien Tchouaméni (21 ans), tous deux excellents récupérateurs et remarquables techniciens.
Dans un registre plus offensif le Lyonnais Houssem Aouar (23 ans, 1 sélection) peut candidater à condition de se montrer plus constant. Enfin plus âgé mais très performant en Ligue 1, le Montpelliérain Téji Savanier (29 ans), s’il se montre à son avantage lors des Jeux Olympiques de Tokyo, pourra également postuler.
Les ailes du désir
La bonne nouvelle de cet Euro est le retour réussi en sélection de Karim Benzema, auteur de 4 buts en 4 rencontres. Après des débuts mitigés, le Madrilène est monté en régime, prenant ses responsabilités pour tirer le penalty contre le Portugal et endossant en vain le costume du sauveur national face à la Suisse.
Offensivement, la vraie lacune de l’Equipe de France s’est située sur les ailes que Didier Deschamps avait décidé de délaisser en optant pour un 4-3-3 sans ailier de formation et avec des latéraux qui n’avaient pas la caisse pour multiplier les courses.
Pour pallier à ce manque, davantage que de nouvelles têtes, on attend du sélectionneur une utilisation accrue du Munichois Kingsley Coman, efficace à chacune de ses entrées en jeu, et du Barcelonais Ousmane Dembélé frustré par les blessures. Ce qui va amener DD à devoir repenser son schéma tactique qui a globalement été sous-performant.
Avec quel plan de jeu ?
Décevant en terme de résultats, l’Euro aura réservé deux satisfactions au sélectionneur : la bonne tenue de la paire Kanté-Pogba et le retour réussi de Karim Benzema. Rien à dire sur les deux premiers cités qui ont parfaitement tenu leur rang dans l’entrejeu tricolore même si on aurait aimé voir Pogba un peu plus actif dans le travail de récupération. Quant à Benzema, outre ses 4 buts, il a noué une forte connexion avec Kylian Mbappé et on a adoré les trop rares minutes où les deux buteurs ont été associés en pointe, multipliant les combinaisons dans l’axe et se révélant des poisons pour le défense suisse. Il est évident que dans cette configuration que l’ancien Lyonnais est le plus à l’aise en Equipe de France et on peut penser que le Parisien préfère partager l’axe de l’attaque que se retrouver exilé à gauche.
Pour opter pour cette attaque à deux têtes, il est temps que le sélectionneur en finisse avec ses atermoiements tactiques. Après le catastrophique 3-5-2, le trop neutre 4-4-2 en losange ou l’hybride 4-3-3, place au système qui a été le plus probant pendant cet Euro : le 4-4-2 à plat avec deux milieux offensifs excentrés. Ce dispositif, outre l’association Benzema-Mbappé (que peuvent venir suppléer Giroud ou Ben Yedder) en pointe, permet d’intégrer à gauche le virevoltant Coman et au milieu de terrain de bénéficier du volume de courses de Griezmann, jamais avare d’efforts défensifs, et qui pourrait rentrer sur son pied gauche en partant de la droite.
Bref ça sent le football que l’on rêve de voir jouer par nos Bleus, on en a presque des étoiles plein les yeux !
A Didier Deschamps d’oser, de renouer avec un football offensif qui sied aux caractéristiques de son effectif. Alors allez DD, lâchez-vous !