Finalement après un bon mois de tractations, d’infirmations (« se queda ») et d’extrapolations en tous genres, Neymar Jr a bien décidé de quitter le Barça et de s’engager pour le PSG pour les 5 prochaines saisons. Moyennant une indemnité de transfert faramineuse, 222M€, qui a suscité nombreux commentaires et qui apparaît démesurée rapportée à l’échelle de nos revenus quotidiens.
Maintenant que « Ney » a franchi les Pyrénées et foulé (avec succès) pour la première fois les pelouses de Ligue 1, Au Café des Sports vous propose de passer ce transfert record au crible pour mesurer si tout ce boucan en valait bien la peine !
Comme une bonne partie des mordus de sport, j’ai été à la fois surpris par les premières rumeurs évoquant l’arrivée de la star brésilienne dans la capitale et agacé par la place que cela prenait dans l’actualité sportive de juillet alors qu’un cycliste français pouvait enfin prétendre à la victoire au Tour de France (que l’on attend désespérément depuis 1985 !). Le moment est venu de passer ce transfert au prisme au de 3 révélateurs : sportif, marketing et économique.
une indiscutable plus-value sportive
Sportivement, l’arrivée de Neymar est clairement une plus-value pour le club parisien qui s’est offert, avec l’argent de ses propriétaires qatari, un des 3 cracks du football mondial. Le brésilien est certes encore en deçà en terme de performance et de palmarès de ses ainés Messi et Ronaldo, mais il redonne un nouveau souffle au projet de QSI et une nouvelle espérance dans sa quête européenne.
Cet apport peut aussi se lire réciproquement par l’affaiblissement sportif causé au Barça par son départ : son absence fut notamment criante lors des deux leçons que lui a infligées le Real en Supercoupe d’Espagne.
Pour les amateurs de football, c’est même une aubaine de voir évoluer en Ligue 1 un talent dont nous avons tant envié nos voisins européens d’en accueillir sans partage ces dernières décennies.
Le PSG va devoir inévitablement vendre pour financer en partie l’arrivée de sa recrue star et ainsi rentrer dans les règles du fair-play financier dictées par l’UEFA.
L’écueil à éviter à présent serait d’imiter le mauvais exemple donné par le Real Madrid des années 2003-2006 où le président Florentino Pérez lança le concept des « Zidane y Pavones », avec le projet d’associer des stars planétaires (aux émoluments élevés) et des jeunes joueurs du cru, quitte à se priver des joueurs peu valorisables en merchandising mais si efficaces sur le pré (comme Makelele transféré à Chelsea parce que Pérez ne voulait pas l’augmenter). Avec au final des résultats sportifs déclinants et l’ex-espoir Pavon qui finit sa carrière à Arles-Avignon…
Le club parisien devra se montrer à la fois compétent dans le choix des joueurs à ne pas retenir et dans la formation de ses meilleurs jeunes amenés à rejoindre l’effectif professionnel, et rester efficace dans son recrutement car il lui manque toujours un gardien de but d’envergure pour espérer atteindre enfin le dernier carré européen !
un gros atout marketing pour le PSG… et pour la Ligue 1
En terme de notoriété et d’impact médiatique, l’attaquant brésilien est une opportunité pour le PSG, et par ricochet pour les clubs français, de conquérir de nouveaux territoires et d’accroitre leur compétitivité.
Neymar est en effet adulé en Amérique du Sud et en Asie, devenue un grand enjeu d’acquisition marketing (merchandising) et commerciale (droits TV) pour les ligues européennes de football. Neymar est le 2ème footballeur le plus suivi sur les réseaux sociaux, juste précédé par Cristiano Ronaldo, et étant âge seulement de 25 ans (contre 32 au portugais) on peut estimer que son potentiel de followers est encore loin d’être atteint.
Ce qui est confirmé par ses premiers pas sur notre sol, où par rapport à l’autre star recrutée par le PSG version QSI, Zlatan Ibrahimovic, il semble dégager plus de chaleur et de capital sympathie à même de séduire un plus large public que les fans du ballon rond. On parie même qu’il s’exprimera bien mieux en français dans 6 mois qu’Ibra après 4 ans passés dans la capitale !
Outre les ventes de maillots et autres produits dérivés que le club francilien pourra développer avec la notoriété accrue de la marque PSG sur ces nouveaux marchés, c’est l’exposition du football français qui va augmenter et permettre de générer ainsi des revenus TV supplémentaires. Ce qui profitera in fine à nos clubs qui bénéficieront de davantage de moyens pour être plus compétitifs sur la scène européenne.
Le président lyonnais Jean-Michel Aulas peut se montrer circonspect du recrutement de Neymar, son club pourrait être à terme un des gagnants à l’échelle européenne de ce transfert !
Et Emmanuel Macron, grand supporter de l’OM, se frotte aussi les mains car l’arrivée sur le sol national du numéro 10 auriverde pourrait rapporter près de 300M€ à l’Etat (100M€ de charges sociales pour le PSG et près de 40M€/an d’impôts sur le revenu et de cotisations pour le joueur) pendant son quinquennat !
un coût déraisonnable, mais pas tant que cela ?
Economiquement, la somme de 222M€ est un montant qui donne le vertige, qui apparaît déraisonnable dans un contexte macro-économique précaire et qui laisse même a minima circonspects les plus fervents des supporters du PSG.
Bien entendu le règlement de cette indemnité n’a pas été un problème pour les richissimes propriétaires qatari qui souhaitent démontrer au monde entier, avec l’achat de Neymar, que l’émirat conserve une puissance financière intacte malgré la volonté d’isolement diplomatique initiée par ses voisins de l’Arabie Saoudite et des Emirats Arabes Unis.
L’argent et l’orgueil du Qatar sont un élément de réponse, mais d’un point de vue de la micro-économie du football la question est de savoir si cette somme colossale est en phase avec les montants versés pour l’acquisition de joueurs en cet été 2017 ?
Tout d’abord il faut bien avoir en tête que ce mercato est marqué par une forte inflation des indemnités des transferts, engendrée par l’application du nouveau contrat des droits TV de la Premier League octroyant 2.3 milliards d’Euros par an aux clubs de l’élite anglaise (à titre de comparaison le contrat actuel des droits TV en France distribue 750 millions d’Euros annuellement aux clubs de Ligue 1).
Les Manchester United, City, Chelsea, Arsenal et autres ont ainsi plus d’argent à dépenser pour acquérir de nouveaux joueurs, et sur un marché à offre limitée tels que celui du football, cette hausse des budgets se traduit par une inflation du coût d’achat des joyaux recherchés.
Ainsi Benjamin Mendy, un gros potentiel mais seulement 4 sélections à ce jour en équipe de France, est devenu le défenseur le plus cher de l’histoire (57.5M€) en étant transféré de l’AS Monaco à Manchester City, ou encore Alvaro Morata, avant-centre remplaçant au Real Madrid derrière Karim Benzema, qui a rejoint les Blues de Chelsea pour 80M€.
Ou enfin, Tiémoué Bakayoko, 1 sélection chez les Bleus, quittant la Principauté pour Chelsea toujours contre un chèque de 45M€, alors que les supporters monégasques, déçus de ses prestations, n’auraient pas refusé de le vendre l’été passé pour quatre à cinq fois moins.
Alors comment placer les 222M€ dépensés par le PSG pour Neymar dans ce marché fou ? Au lieu de raisonner en valeur absolue, essayons de raisonner en valeur relative et comparer ce transfert record au précédent transfert record établi en son temps par le multiple Ballon d’Or Cristiano Ronaldo.
Lors de l’intersaison 2009, Ronaldo quitte Manchester United pour le Real Madrid contre une indemnité de transfert de 94M€. Lors de ce même été, les autres principaux attaquants transférés (Ibrahimovic, Benzema, Tevez, Eto’o, Gomez) l’ont été pour un montant moyen de 35M€, soit 37% de la valeur du transfert de CR7.
Pour cette édition 2017, si nous reproduisons cet exercice en comparant le montant du transfert de Neymar aux montants des autres principaux attaquants transférés cet été (Lukaku, Morata, Lacazette), on obtient une valeur relative de 34% (75M€ de montant moyen comparé aux 222M€ d’acquisition de Neymar), très proche de celle obtenue pour Ronaldo en 2009. Et encore cette valeur de référence de 2009 pourrait même être dépassée si le Barça arrive à convaincre Dortmund de lui céder Ousmane Dembélé pour une somme avoisinant les 120M€.
Autrement dit, le montant du transfert de Neymar n’apparait pas disproportionné toutes choses égales par ailleurs dans l’économie bien particulière qui est celle du football.
Et n’oublions pas que Cristiano s’est avéré être un investissement plutôt réussi pour le Real qui a retrouvé depuis son arrivée le succès sur la scène européenne et est devenu le club le plus riche de la planète.
En toute théorie, l’achat de Neymar semble donc être une bonne affaire réalisée par le PSG. Elle doit maintenant être validée par les résultats qui seront obtenus sur le terrain. Ainsi que par les performances de Neymar, qui devra démontrer, à l’instar de Messi ou de Ronaldo, sa capacité à guider le collectif parisien vers le graal européen, à postuler au titre de meilleur footballeur de la planète et à s’inscrire dans la durée dans notre Ligue 1, qui n’est pas encore au niveau des championnats anglais et espagnols. A toi de jouer l’artiste !