Alors que le sport se pratique actuellement sur le canapé et devant des travées vides, sa principale tribune d’expression est également devenue muette depuis le 8 janvier. L’Equipe est à l’arrêt, et nous un peu avec.
Conflit avec la direction
Le manque est frappant, saisissant. Alors que la société tourne au ralenti depuis 10 mois, le régulateur de nos débuts de journées et de nos week-ends s’est lui-aussi mis sur pause, ébranlé par cette crise qui n’épargne personne.
Les salariés de l’Equipe s’opposent en effet depuis début janvier à un plan social soumis par la direction du journal qui vise à supprimer une cinquantaine de postes dans les rédactions du quotidien mais également de France Football et de Vélo Magazine.
Comme la plupart des titres de la presse, l’Equipe subit une baisse structurelle de ses ventes qui s’est aggravée en 2020 (-13% entre novembre 2019 et 2020) en raison du Covid et de l’arrêt des compétitions au printemps.
Face aux pertes engendrées, la direction du quotidien cherche à les compenser en ciblant une économie de 5M€ avec un plan de départ de 15% de ses effectifs. Les salariés s’y opposent en mettant en avant la bonne santé financière du Groupe Amaury également organisatrice du lucratif Tour de France.
Depuis le 8 janvier, le quotidien sportif est donc absent des kiosques et son site Internet dénué de contenu éditorial.
Une présence moins imposante mais rassurante
Longtemps, l’omnipotence de l’Equipe sur le traitement de l’actualité sportive a fait débat dans un pays qui ne compte qu’un seul titre dédié au sport là où ils sont au nombre de 3 en Italie ou 5 en Espagne.
Véritable leader d’influence, notamment lors de la campagne anti Aimé Jacquet avant le premier sacre des Bleus, la mainmise du quotidien s’est depuis nettement affaiblie. Les ressentiments post 1998 sont d’abord passés par là, puis Internet a explosé, faisant voler en éclats le monopole de l’actualité sportive alors régenté par le titre du groupe Amaury. Les scoops sont devenus réchauffés, l’écriture moins incisive, le traitement bien plus ordinaire.
Certes devenue progressivement moins puissante, L’Equipe n’en demeure pas moins un barycentre qui nous accompagne fidèlement dans notre culture sportive et même générale depuis notre enfance. Guingamp, Aberdeen, Lodz, Craiova, autant de compétence géographique que le journal nous a légués bien plus efficacement que tout Atlas offert à Noël ou pour les communions.
Avec le temps nos attentes se sont élevées, on la trouve incomplète (alors que son contenu a probablement doublé en 30 ans), agaçante quand elle ouvre sa une trop facilement aux gamineries du PSG et de l’OM, ou bien énervante lorsque la brillante plume de Vincent Duluc trempe dans des tonalités trop lyonnaises.
Mais, malgré nos exigences et l’infinité de médias à notre disposition, L’Equipe nous manque un peu, beaucoup. Et peut-être même plus encore dans cette période contrainte en libertés où le récit sportif nous rassure, nous extrait des inquiétudes et permet de nous évader enfin.
Reviens-nous vite L’Equipe !
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